
Le Guide Culinaire
Les Grillades
Les opérations culinaires effectuées par la Grillade sont classées au premier plan de celles dites de concentration.
En effet, dans la plupart des cas, le premier point à atteindre est de concentrer à l'intérieur du morceau de viande en traitement, les sucs et jus, ou principes nutritifs des substances cuites de cette façon.
La Grillade, qui est en somme un Rôti à feu libre, représente pour nous l'extrême point de départ, la genèse de l'Art culinaire.
C'est la prime idée surgie en d'arides cerveaux, le progrès naissant du désir instinctif de mieux manger, le premier mode employé pour la cuisson des aliments.
Un peu plus tard, conséquence logique de ce premier essai, de la Grillade naquit la Broche et déjà, en l'instituant, l'intelligence se substitue à l'instinct, la raison déduit des conséquences, l'expérience tire des conclusions ; et la cuisine s'engage alors dans la voie où, depuis lors, elle continue sa marche ascendante.
Grillades de Viandes noires
Dans la conduite de la Grillade, le point de départ repose tout entier sur l'observation du degré de température qu'il convient d'appliquer à chaque objet.
Plus cet objet sera volumineux et chargé de principes nutritifs, plus son saisissement, c'est-à-dire son rissolage extérieur, devra être fait vivement et fortement.
A l'article des Braisés nous avons expliqué le rôle et l'utilité du rissolage, mais il est nécessaire d'y revenir en ce qui concerne les Grillades.
S'il s'agit de grosses grillades de viandes noires, comme Boeuf et Mouton, l'enveloppe rissolée devra être d'autant plus résistante que ces viandes seront d'excellente qualité et, partant, chargées de sucs.
La poussée de ces sucs contre l'enveloppe rissolée sera d'autant plus violente qu'ils seront plus abondants, et cette poussée augmentera au fur et à mesure que les jus s'échaufferont.
Si le feu de la Grillade est bien réglé pour assurer la pénétration progressive de la chaleur dans l'objet en cuisson, il se produit ceci :
- La chaleur, frappant directement la partie de la viande en contact avec le combustible embrasé,
- contracte d'abord les fibres en contact avec le gril, puis
pénètre dans les tissus,
s'y propage par couches en refoulant dans l'intérieur les sucs qui finissent par traverser la pièce en cuisson et viennent perler à la surface du côté cru.
C'est alors que cette pièce est retournée sur le gril et que le même processus de cuisson recommence du côté cru, jusqu'à ce que les sucs refoulés par en haut et arrêtés par la surface grillée la première, traversent celle-ci en formant de petites perles de sang qui indiquent l'à-point de cuisson.
Il s'indique que, si le morceau à griller est très gros, l'intensité du feu doit être diminuée aussitôt que la formation de l'enveloppe rissolée est obtenue, afin d'assurer la pénétration progressive de la chaleur dans l'intérieur du morceau.
- Si le feu était maintenu au même degré, il arriverait :
- que l'enveloppe rissolée se trouverait promptement carbonisée ;
- que cette croûte brûlée s'opposerait à toute pénétration de la chaleur dans l'intérieur ;
- et que, finalement, on arriverait à obtenir une viande complètement brûlée au dehors et absolument crue dans l'intérieur.
S'il s'agit de viandes grillées dont l'épaisseur est relativement petite, un saisissement à feu ardent, et quelques minutes de cuisson ensuite, suffisent pour les mettre au point. Dans ce cas, point n'est besoin de modérer l'intensité du feu.
Exemple : Un Rumpsteak ou un Chateaubriand devront, pour être amenés sûrement à leur juste point de cuisson, être fortement saisis d'abord pour la formation de la couche rissolée, barrière opposée à la sortie des jus, et conduits ensuite à feu plutôt modéré, pour que la chaleur, en les pénétrant progressivement, assure la cuisson de l'intérieur.
Les petites pièces, comme Tournedos, Petits Filets, Noisettes, Côtelettes, peuvent après le saisissement rigoureusement obligatoire, être maintenues à la même intensité calorifique, parce que l'épaisseur de viande que doit pénétrer la chaleur est moindre.